Ecrivain et photographe, Jean-Paul Dumas Grillet vit entre Munich et Plougasnou. Il écrit de lui :
« La photographie a toujours été au centre de mon existence. Mon père était photographe et j’avais reçu de sa part pour mes six ans un appareil Kodak DeLuxe avec lequel j’ai pris mes premiers clichés. J’ai publié plusieurs livres : Adorae Curieux Zamok, portrait de petites filles sérieuses, au Chêne-Hachette, Tombeaux de Sable et de Lumière, aux éditions Fata Morgana ; La Sorgue Baroque, Éditions du Musée Pétrarque.
Mes photographies sont présentes dans les collections de la Bibliothèque Nationale, notamment la série des Apôtres présentée à la BNF dans le cadre de l’exposition Portraits/Visages, 1853-2003 avec un catalogue édité chez Gallimard. D’autres collections ont acquis mes photographies : Bank Austria, le Château d’Eau à Toulouse, la Collection d’Art contemporain de la Société Générale, etc. J’ai longtemps exposé à la Galerie Vieille du Temple (aujourd’hui galerie Marie-Hélène de la Forest Divonne) et dans de nombreux musées : musée des Beaux-Arts de Rouen, Centre de Création contemporaine de Tours, Palais de Beaux-Arts de Lille, Centre d’Art contemporain de la Maison de la Culture de la Province de Namur…
Au cours de ces quelques décennies passées à photographie, j’ai utilisé ce médium sous à peu près toutes ses formes : chambre de grande taille pour les Apôtres, polaroïd, appareils jetables, téléphones portables, numérique pour les dernières séries… Les images ont été tirées sur des papiers artisanaux à l’albumine ou au platine aussi bien qu’en impression, aujourd’hui.
La photographie est le seul médium artistique, avec le cinéma, fondé sur l’enregistrement de la réalité. Ce que je trouve fascinant. Cette singularité de l’enregistrement est notée au sujet du cinéma par Robert Bresson — « La caméra enregistre une substance » — et par Jacques Rancière — « L’œil mécanique voit et transcrit une matière sensible immatérielle, faite d’ondes et de corpuscules ». C’est ainsi que je pratique la photographie en limitant la prise de vue au simple saisissement d’une réalité qui se donne à voir par épiphanies successives et dont l’appareil photographique recueille la trace.
En 2013, j’ai fait un premier séjour à Plougasnou. J’ai immédiatement ressenti que j’avais trouvé l’endroit où vivre, le lieu qui serait pour moi celui de l’imprégnation. J’ai commencé à photographier la mer, les rochers de la pointe de Primel, la plage. Depuis que je suis installé la moitié du temps à Primel, où j’ai acquis une maison, le monde qui m’environne est devenu le principal sujet de mon travail photographique et j’ai plusieurs projets en cours concernant la Pointe et les alentours. Il n’est pas facile de s’aventurer dans la photographie de paysage, mais ce lieu l’appelle irrésistiblement. Au fil du temps, avec des approches différentes, en différentes saisons, à des heures différentes du jour et de la nuit, en évitant le spectaculaire ou la tentation d’interpréter, la Pointe livre quelque chose de sa substance intemporelle. D’autre part, depuis quelques mois, je photographie mon existence à Primel, souvent solitaire, les rituels du quotidien comme de monter simplement à pied faire les courses à Plougasnou ou de rendre une visite à des amis à Saint-Jean-du-Doigt. Il s’agit plus dans cet exercice de confronter la vie de tous les jours à quelque chose qui la dépasse — qui est peut-être dans la beauté de ces paysages immémoriaux opposée à la simple existence humaine passagère. »
